Au rang des perdants des violences engendrées par les partis de l’opposition ivoirienne, dans la ville de Bouaké, où il n’y a pas eu de violences, se trouvent les « vendeuses de sexe » ou les “Kpoclés”.
Il est désormais difficile pour cette catégorie de personnes de s’arracher un client en une nuit. Au lieu-dit « carrefour Fromager » au quartier Nimbo Bouaké, un endroit de prédilection de cette race de travailleuses, un groupe d’une douzaine de personnes constituées de jeunes filles et femmes, installées de part et d’autre de la chaussée de la rue, attendent impatiemment des potentiels clients ce vendredi 13 novembre 2020.
Il est peu plus de 21H, ce jour de bonnes affaires comme il est de coutume chaque week-end dans ce secteur. La présence des étrangers dans la ville pour des activités ou événements divers ne répond en rien aux besoins. Des bars et snacks installés sur la voie menant au quartier Air-France 1 distillent des décibels donnant ainsi l’occasion à ces détentrices de « comptoirs de sexe » d’esquisser des pas de danse.
Au passage d’un homme, ces vendeuses de corps, à moitié nues accourent et proposent chacune « son produit » en y ajoutant quelques détails sur la qualité. Dans ce comptoir de commerce du sexe, cigarettes et boissons, accompagnent ces noctambules dans des multiples coins d’ambiance festive.
Dans la foulée, chacune consciente du contexte actuel se met à l’œuvre pour s’arracher au moins un client. F. B, un habitué de ce coin confiera que « le domaine d’activité des prostituées recrute au quotidien. Avant, il fallait être un habitué de ce milieu pour se rendre compte de telles pratiques. Mais aujourd’hui, plus nombreuses, elles s’exposent en bordure de route à la recherche du client ».
Cette « suralimentation du comptoir » influence le prix de l’offre. Actuellement, selon, S.K, un abonné, « il est plus facile de s’offrir une partie de jambe en l’air à 500F. Pourtant, il fallait débourser au moins 1000F. Le week-end, ce prix était multiplié par trois » confie-t-il.
« Les étudiantes sont venues nous gâter le marché. Il n’est plus aisé d’avoir les clients. Ils sont toujours présents mais nous sommes de plus en plus nombreuses. Avant, certains clients nous invitaient dans la ville de Bouaké le temps de leur séjour, mais depuis le début de la crise sanitaire du Covid-19 et à cela est venue la crise postélectorale, cette opportunité ne s’ouvre plus à nous. Au contraire, celles de l’université Alassane Ouattara sont venues nous retrouver au fromager et sur d’autres sites », confie, A.J, l’une des vendeuses de sexe avec le regard aux aguets.
Pour les clients, c’est une occasion à saisir. « Il y a toujours des gens qui gagnent derrière chaque malheur. Comment ne pas profiter de la présence de ces étudiantes pour se mettre en joie », soutient cet autre habitué de ces lieux, M.P.
A quelques mètres du lieu-dit « au manguier » connu sous le nouveau nom ” campus 3“, le site des étudiantes prostituées, non loin de la direction des Impôts, ce même vendredi, il est 22H19, dans l’un des bars installés à cet endroit, la bière coule à flots dans une ambiance surchauffée. Le porc pimenté agrémente la partie. Légèrement habillées, de quoi faire plaisir aux « financeurs », elles se font plaisir avec le minimum. « On descend la bière d’abord même s’il n’y aura pas l’argent après. C’est rare d’avoir des occasions de cette nature aujourd’hui », lance l’une d’elles. « Le malheur des uns faisant le bonheur des autres », les habitués de ces coins capitalisent au maximum.
Oscar de Ouellé
Correspondant régional