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Côte d’Ivoire/ Barrage de Singrobo-Ahouaty (1/2): le processus d’indemnisation laisse les femmes et les communautés impactées dans le désarroi total

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Le projet d’aménagement du barrage hydroélectrique de Singrobo-Ahouaty, dans les sous-préfectures de Taabo et Pacobo, laisse un goût amer aux femmes et aux communautés impactées. Après la perte de leurs terres, des cultures agricoles ou des activités économiques, les victimes peinent à joindre les deux bouts. Notre enquête.

Les populations des villages des sous-préfectures de Taabo et Pacobo, (Singrobo, Ahouaty, N’dènou, Pacobo et Ahérémou 2) expriment leur mécontentement face au Plan d’Action de Réinstallation (PAR) et la Sauvegarde Opérationnelle de la Banque Africaine de Développement, structure financière du projet concernant le barrage de Singrobo-Ahouaty, situé dans la sous-préfecture de Pacobo, au sein du département de Taabo de la région de l’Agneby-Tiassa, en Côte d’Ivoire. La cause du mécontentement des populations : les compensations qui auraient dû garantir aux communautés impactées, le maintien de leur niveau de revenu avant l’exécution du projet dans leur localité.

30 000 personnes, dont 16 000 personnes dans la zone d’influence directe du barrage hydroélectrique de Singrobo-Ahouaty ont été recensées par le Bureau national d’Etudes techniques et de Développement (BNETD), pendant la réalisation de l’Étude impact environnemental et social (EIES). Elles ont tout perdu. Champs, commerces, et terres.

En guise de compensation,  le Plan d’Action et de Réinstallation (PAR) élaboré en 2016 par la structure en charge ( BNETD) suite à l’EIES et actualisé en 2020, par la cellule d’exécution du PAR (initiée par le Secrétaire général de la préfecture de Taabo),  prévoyait un  paiement monétaire, en nature ou les deux combinés, des coûts de tous les biens perdus. Cependant, le constat sur le terrain est tout autre. Dans de nombreux cas, les femmes et les communautés se sont vues privées de leurs droits par des processus de compensation peu clairs.

Nous sommes à Singrobo, C’est ici que résident de nombreuses victimes qui ont perdu leurs sources de revenus et leurs moyens de subsistance, à qui l’État avait promis des indemnités. Malheureusement, elles n’ont pas été versées ou ont été significativement réduites.

Plusieurs mareyeuses omises…

 Konan Ahou Pauline, l’une des mareyeuses oubliées de Singrobo exhibe les cartes délivrées par le service halieutique de Taabo.

« Avant, j’obtenais un bénéfice de 150 000 FCFA ou même 200 000 FCFA par mois. Aujourd’hui, nous n’avons plus assez de poissons pour livrer à nos clients et nous sommes obligés de nous rendre jusqu’à Tiassalé pour en acheter à des coûts plus élevés. Nous vendons à perte avec des dépenses supplémentaires (le transport). Il n’y a plus de moyens pour les soins médicaux, les loyers… Pis, nous avons été ignorées dans le processus d’indemnisation, malgré nos cartes de mareyeuses établies par le service halieutique de Taabo et l’inscription sur la liste du recensement. Aucune de nos requêtes n’a abouti. Vivre une situation pareille à plus de 70 ans ! ». Ces propos de Effoua Marie Brown traduisent la désolation et la déception des 12 mareyeuses oubliées du village de Singrobo dans le processus de compensation.

L’histoire précitée est loin d’être isolée. À Ahérémou 2, village situé à 159 km d’Abidjan et 66 km de Yamoussokro, des mareyeuses qui s’approvisionnaient à Singrobo sont restées en marge du processus. Elles se retrouvent sans activités génératrices de revenus. C’est le cas de Amenan Marcelle, Ahou Simone Aka et Aya Jeannette Konan. « Nos commerces sont suspendus, du fait de la rareté des poissons et des frais supplémentaires qu’il faut pour en avoir dans d’autres localités, puisque le barrage a engendré ce déficit. Nous n’avons même pas été recensées et donc aucun fonds de soutien pour nous », témoignent-elles.

Conséquences. Amenan Marcelle, 60 ans et mère célibataire de 4 enfants, devenue ex-mareyeuse par la force des choses, a obtenu, dans sa recherche d’alternative, un prêt d’une somme de 1 000 000 FCFA, en 2023, à la COOPEC, une mutuelle d’épargne crédit. Un montant qu’elle a injecté dans un champ d’igname dont le rendement a été fortement impacté par les effets du changement climatique.  « Malheureusement, il n’y a pas eu de pluie, donc j’ai tout perdu. Je n’ai aucun fonds pour le remboursement. Les agents viennent tout le temps pour m’encaisser », raconte-t-elle.

L’ex-mareyeuse, Amenan Marcelle, lors de l’interview réalisée en mars 2024, à Ahérémou 2

Cette femme, qui auparavant s’en sortait avec un revenu quotidien de 15 000 FCFA à 30 000 FCFA grâce à son commerce, se trouve aujourd’hui dans une situation précaire et confie avoir développé de l’hypertension à force de s’inquiéter. « L’arrêt des activités m’a tellement fait réfléchir et souffrir que j’ai maintenant de la tension. J’avais déjà le diabète et, de plus, je n’ai pas pu continuer à suivre le régime nécessaire… », confie-t-elle.

Ahou Simone Aka, mariée et mère de six enfants, également ex-mareyeuse résidant à Ahérémou 2, se souvient d’une situation délicate qui a aggravé son désarroi. « Ma famille et moi dépendons désormais de mon mari. Si lui ne peut pas subvenir à nos besoins, nous sommes contraints de mendier. Il n’y a pas si longtemps, mon enfant de 4 ans est tombé malade en l’absence de son père. Il souffrait d’anémie. J’ai dû demander de l’aide pour les soins. Revivre cette journée pénible m’a replongé dans le passé, où mon autonomie me permettait de bien vivre. Cette épreuve m’a profondément affectée et la douleur a été intense. En plus, j’ai la vision floue depuis que j’ai commencé à travailler dans les champs. Le médecin dit que c’est la fumée sur les champs qui cause cela, mais je n’ai pas d’autre choix », raconte-t-elle, le visage marqué par l’anxiété.

Selon ces ex-mareyeuses rencontrées et interrogées en mars 2024, une trentaine de femmes dans cette localité (Ahérémou 2) vivent ces réalités similaires.

Les droits des victimes piétinés 

Les propriétaires terriens, les pêcheurs et les cultivateurs impactés par le projet qui affecte 730 ménages économiques et occupe 1362,2 ha de terrains agricoles, font aussi l’expérience de la détérioration des conditions de vie avec des changements significatifs dans les modes de vie, et la perte de leurs moyens de subsistance. Tout a commencé avant l’étape des indemnisations amorcée en début 2019, lorsque l’entité promotrice, Ivoire Hydro Energy (IHE), a établi le premier contact avec les communautés.

« IHE a promis que toutes les personnes concernées par le projet seraient dédommagées sur une période de trois ans. Ensuite, le BNETD est intervenu pour s’imprégner de nos réalités. Des tests de captures de poisson ont été menés avec les pêcheurs, des vérifications ont eu lieu sur les parcelles des cultivateurs, les mareyeuses ont été sondées par des questionnaires, et les propriétaires terriens ont également été rencontrés. Ces enregistrements ont été effectués à l’aide d’un GPS, dans lequel nos photos ont été stockées. Nous étions en 2016 », explique Konan Kan Yverin, pêcheur et agriculteur issu d’une famille de propriétaires terriens.

Après la phase des tests, poursuit-il, « on nous a donné pour instruction de ne plus travailler nos terres et que l’indemnisation ne prendrait pas en compte les travaux postérieurs. La majorité a respecté cette consigne. Les négociations d’indemnisations ont commencé avec le BNETD et, trois jours plus tard, nous avons été informés que CI-Energies prendrait le relais. Certains d’entre nous n’ont pas pu passer à la négociation . »

 Il ajoute : « Trois ans après, en 2019, CI-Energies est revenue pour une actualisation des données, afin d’ajouter à la liste définitive les nouvelles personnes impactées qui s’étaient installées après le recensement de 2016. À cette étape, les pêcheurs ont apporté leur matériel de pêche pour une nouvelle capture d’image qui était comparée à l’ancienne. Les cultivateurs ont également posé devant leurs parcelles. Finalement, ceux qui avaient respecté la décision de ne plus travailler après le recensement de 2016 ont reçu 30 000 FCFA par culture, une somme d’aide à la réinstallation, disent-ilscar il n’y avait plus de culture. Ceux qui n’ont pas respecté les directives ont reçu des montants plus élevés. C’est malheureux. Ils nous ont dupés ».

Certificat de compensation d’un exploitant agricole, l’une des victimes des contradictions du PAR

Le Plan d’Action de Réinstallation de 2018, élaboré par le BNETD, spécifie que le recensement des personnes affectées et l’inventaire des biens impactés par le projet ont été achevés entre le 19 janvier 2016 et le 30 juin 2016. Conformément à ce rapport, aucune indemnisation n’est envisageable pour l’occupation ou l’exploitation des terres ou des ressources visées par le projet après cette date. Les cultivateurs enregistrés avant le 30 juin 2016 et ayant respecté l’instruction de ne plus cultiver leurs terres étaient initialement éligibles à une indemnisation plutôt qu’à une simple aide à la réinstallation.

Cependant, lors de l’actualisation du PAR, une nouvelle date limite a été fixée au 16 mai 2019, qui correspond à la fin de la réactualisation des données sur le terrain. Selon cette mise à jour, tout exploitant d’une parcelle agricole affectée par le projet et sans culture au moment de l’actualisation recevra une aide à la réinstallation, et non une indemnisation pour la perte de culture.

Dans une enquête du journal “Eléphant Déchainé”, le confrère Noël Konan a exposé la position de l’ancienne Directrice de la production à CI-Energies, Assoumou Nanan.  Elle a déclaré: « Vous voulez que j’indemnise quelque chose que je n’ai pas vu ? Je le veux bien, mais comment je l’explique à celui à qui je dois rendre des comptes ? » a-t-elle demandé au cours d’une rencontre organisée par le Préfet de département du Taabo, Assamoi Florentin, le 19 mai 2019. Elle a également mentionné que des populations ayant continué à exploiter leurs terres, contrairement aux directives initiales, recevraient des indemnités importantes, jusqu’à 10 000 000 FCFA, tandis que ceux qui avaient abandonné leurs cultures conformément aux directives ne recevraient que de l’aide pour la réinstallation, dont le prix est fixé sur la base des enquêtes effectuées au préalable.

Des compensations jugées dérisoires…  

Konan Kan Yverin fait partie des pêcheurs qui ont participé à la phase des négociations d’indemnisation avec le BNETD. Il devait initialement recevoir 1 800 000 FCFA. Au moment du paiement, il s’est vu attribuer seulement 200 000 FCFA. « Je n’étais pas d’accord. Ils m’ont dit que c’était à prendre ou à laisser. J’ai une femme et sept enfants scolarisés. Avec 200 000 FCFA, on peut tout juste acheter du vin. Ils diront ensuite que nous sommes devenus des ivrognes au village, mais c’est la douleur qui pousse à cela », confie-t-il amèrement.

Triplement impacté, il a uniquement bénéficié de 30 000 FCFA pour l’aide à la réinstallation agricole et de 200 000 FCFA pour la pêche. S’il a bien été enregistré au départ en tant que propriétaire terrien, il apprendra au fil du temps que ce bien familial est « une propriété de l’Etat ».

Kouadio Moïse, issu également d’une famille de propriétaires de terres (famille Angoua) et pêcheur, raconte aussi sa mésaventure. “Le BNETD avait évalué à 12 hectares la surface qui serait utilisée pour le projet du barrage hydroélectrique de Singrobo-Ahouaty. Avec CI Énergies, nous sommes retournés mesurer la parcelle et, cette fois, ils prétendent que c’est 6 hectares. En réalité, ils ont empiété sur plus de 12 hectares. Le mètre carré a été indemnisé à 375 FCFA alors que le BNETD avait promis 600 FCFA. Pour la pêche, j’ai reçu 110 000 FCFA, et le document indiquait à tort « indemnisation culture ». Quand nous avons protesté, ils ont rectifié au stylo sur nos documents. Qui sait si cela a été corrigé dans leur système informatique ? Le BNETD avait pourtant affirmé que le montant minimal par pêcheur serait de 1 500 000 FCFA », détaille celui qui est également membre du Comité jeune de Singrobo, chargé de la propreté du village.

Selon le Président des pêcheurs de Singrobo, Konan Kokora Moïse, malgré les maigres sommes reçues, une trentaine de pêcheurs du village n’ont pas pu obtenir leur dû. Yao Konan Gilbert en fait partie. « Le BNETD avait validé une indemnisation de 1 400 000 FCFA par an, sur trois ans. Je figure sur la liste produite par CI-Energies, mais je n’ai pas reçu un centime. J’ai sombré dans une dépression. Comment subvenir aux besoins de ma famille et de mes quatre enfants ? Avant, mon travail me rapportait au moins 45 000 FCFA par jour. Aujourd’hui, il est rare, voire impossible, de gagner 1500 FCFA en fin de journée », témoigne-t-il.

Une réclamation a été faite par la suite, mais seulement deux personnes ont eu gain de cause. Indignés par la tournure des choses, les communautés touchées par le projet n’ont qu’une volonté commune :  entrer en possession de leurs droits. « Nous voulons les sommes qui nous avaient été promises. Il est essentiel que les personnes oubliées soient considérées sur les mêmes bases, afin que d’autres puissent se reconvertir professionnellement », lâchent-elles à l’unanimité.

Le projet de construction de la centrale hydroélectrique de Singrobo-Ahouaty coûte 140 millions d’euros (environ 93 milliards de FCFA), auxquels s’ajoutent 19,5 millions d’euros soit plus de 12 milliards de FCFA pour l’impact environnemental et social, mais les villages affectés et les populations n’en ressentent pas les effets. « Le village est perdant. Pas d’école, pas de dispensaire, pas de collège, comme promis. IHE a juste construit 3 salles de classe et fait quelques dons de tables et bancs. Ils disent qu’ils vont travailler sur près de 30 ans, on ne voit encore aucune politique sociale. On n’est même pas contents de IHE. Quand on est pauvre, on devient nerveux. La Commission administrative n’a pas été fonctionnelle. L’intérêt des populations a été mis à l’écart. Dommage ! », s’indigne le notable de Singrobo et membre de la Commission administrative de purge des droits coutumiers, Diallo Babakan.

Le barrage hydroélectrique de Singrobo-Ahouaty achevé à plus de 80% est censé être livré en 2024. Si l’avancée des travaux est une fierté pour l’Etat de Côte d’Ivoire et ses bailleurs, des populations affectées, elles, continuent de crouler sous le poids de la misère depuis le début de la réalisation de cette infrastructure.

Marina Kouakou

Encadré 1

« Les cartes professionnelles ne constituent pas une preuve suffisante de l’activité réelle » 

Le Chef de service et technicien supérieur halieute M. Bessou, rencontré le 6 mars 2024, à Taabo. 

La Direction départementale des ressources animales et halieutiques, localisée à Taabo, a apporté un éclairage supplémentaire sur les méthodes de sélection des pêcheurs et des mareyeuses affectés par le projet hydroélectrique. A l’occasion d’une rencontre dans ses services, le 6 mars 2024, M. Bessou, Chef de service et technicien supérieur halieute, a précisé que les cartes professionnelles n’étaient pas le critère principal lors des enquêtes. Selon lui, la détermination des bénéficiaires s’est basée sur l’activité réelle plutôt que sur la possession de cartes professionnelles. « Les cartes, je les délivre à quiconque en fait la demande et paie 5 000 FCFA par an. Elles ne constituent donc pas une preuve suffisante de l’activité réelle », explique-t-il. Les mareyeuses devaient démontrer que 90 % de leurs revenus provenaient de cette activité, et beaucoup n’ont pas réussi à fournir des réponses satisfaisantes lors des enquêtes, notamment sur les sources des pêcheurs qui leur livraient du poisson.

Bessou a également mentionné la participation d’agents de liaison communautaires pour aider à établir les faits. Cependant, malgré les plaintes des communautés, aucune démarche formelle n’a été entreprise : « L’année dernière, un groupe de femmes est venu discuter de leurs problèmes. J’ai conseillé au Directeur de ne pas y donner suite, une position soutenue par un représentant de IHE présent lors de cette discussion », révèle-t-il.

En ce qui concerne les pêcheurs, trois catégories étaient distinguées : occasionnels, de subsistance, et professionnels. « Les Gbozo (les Maliens) sont en majorité des pêcheurs professionnels. Ils dépendent exclusivement de la pêche pour leur subsistance. Si cela ne tenait qu’à moi, aucun Ivoirien ne serait inclus. Ils pratiquent cette activité de façon sporadique. Les plaintes de ceux qui n’avaient pas d’embarcations lors des tests, ou ceux dont les embarcations étaient neuves, n’étaient pas fondées. Ceux qui devaient être inclus ont été pris en compte, d’où l’échec de la plupart des réclamations », tranche Bessou.

Encadré 2

Purge des droits coutumiers : pourquoi 375 F au lieu de 600 F le mètre carré ?

Définir la purge des droits coutumiers.

Pour la purge des droits coutumiers des personnes affectées par le projet d’aménagement du barrage hydroélectrique de Singrobo-Ahouaty, les textes sont clairs. Le décret n°2013-224 du 22 mars 2013 tel que modifié par le décret n°2014-25 du 22 janvier 2014 portant réglementation de la purge des droits coutumiers sur le sol pour intérêt général, en son article 7, fixe le coût maximal de la purge pour la perte des droits liés à l’usage du sol, à 2000 FCFA le mètre carré pour le District Autonome d’Abidjan, 1000 FCFA le mètre carré pour le District Autonome de Yamoussoukro, 1000 FCFA le mètre carré pour le Chef-lieu de Région, 700 FCFA le mètre carré pour le Département, et 600 FCFA le mètre carré pour la Sous-Préfecture. Les populations impactées des sous-préfectures de Taabo et Pacobo sont concernées par la somme de 600 FCFA le mètre carré.

Mais à en croire le gouvernement ivoirien, le montant de la purge des droits coutumiers a été fixé à 375 FCFA le mètre carré à la suite des négociations entre la Commission administrative de purge des droits coutumiers et les populations concernées, conformément à la nouvelle version du décret qui mentionne que « les prix en-deçà des maximas ainsi fixés peuvent être négociés par les parties pour la purge des droits ».

Le Secrétaire général de la Préfecture de Taabo, Djibril Traoré interviewé à son bureau le 6 mars 2024, à Taabo, lui, laisse entendre que des négociations ont été faites entre les populations et CI- Energies sur la base du décret pour la purge des droits coutumiers. « Ils ont été d’accord. C’est à partir de là que les indemnisations ont été faites. La négociation est allée par étapes avec les structures techniques. Certains ont bénéficié des cultures et de la purge parce qu’il s’agissait de leur propre terre. Quand on n’est pas d’accord, on ne fait rien. Tous ceux qui étaient impactés dans leur culture ou dans leur terre ont fait l’objet d’indemnisations, sauf les personnes qui sont allées au tribunal pour des mésententes familiales. Le travail de la Commission administrative (présidée par le Préfet de Taabo) a pris fin depuis 2021. Personne n’a reçu 30 000 FCFA ! Si tu as reçu 30 000 FCFA, c’est que tu as fait deux pieds de manioc », s’étonne-t-il.

Une version que les communautés ne reconnaissent pas. En témoigne le rapport du PAR 2018,  dans lequel les populations interrogées sur le montant de la purge des droits coutumiers ont exigé que le prix du mètre carré fixé à 600 FCFA soit respecté. À cette préoccupation, le Chargé d’études du BNETD Kadjo Pierre Akpangni, aussi réalisateur du PAR 2018 répondait : « La grande majorité des intervenants opte pour un taux de 600 FCFA/m². Mais, je tiens à préciser que le décret dispose que seule la Commission Administrative a compétence pour négocier et fixer le taux applicable à tous à un prix inférieur ou égal à 600 FCFA/m² qui un est prix plafond indicatif pour les chefs-lieux de Sous-préfecture ».

Le responsable de la communication IHE, Alain Laubouet, rencontré à Singrobo, le 7 mars 2024 en compagnie de quatre autres agents de la structure, a déclaré ne pas être autorisé à discuter de cette question avec la presse, sans procédures préalables.

Les courriers de demandes d’informations adressés à CI-Energies le 25 mars 2024 et trois jours plus tard à IHE, en vue d’éclairer la lanterne des communautés impactées restent vaines jusqu’à ce jour.

Cet article a été réalisé dans le cadre du projet plaidoyer pour une meilleure prise en charge des populations impactées. Il est mis en oeuvre par l’Ong Jeunes Volontaires pour l’Environnement (JVE-Côte d’Ivoire).

Marina Kouakou