Suivez nous sur:

Actualité

Guerre en Ukraine- La contestation monte en Russie en dépit de la répression

Publié

le

Au huitième jour d’offensive, la Russie est un pays fracturé et apeuré par une guerre que même ses élites n’ont pas vu venir. Il y a le soutien au pouvoir, le déni, et ceux qui avec leurs moyens tentent de protester avec les pires difficultés. Des enfants de 10 ans en Sibérie ont terminé au commissariat avec leurs pancartes : « Non à la guerre ». Malgré l’espace qui se restreint, quelques-uns tentent encore de se faire entendre.

Une semaine après le lancement de leur opération, les forces russes ont pris Kherson, grande ville du sud de l’Ukraine. C’est la plus grande ville prise depuis le début de ce conflit. Ce jeudi 3 mars au matin commence une deuxième session de discussions sur un cessez-le-feu entre négociateurs russes et ukrainiens. Mais la contrepartie reste une reddition totale de Kiev. Si l’armée russe arrive à prendre le contrôle de Marioupol, au bord de la mer d’Azov, alors elle pourra assurer une continuité territoriale entre ses forces, nombreuses, qui arrivent de la Crimée annexée et celle du Donbass séparatiste.

À quel prix ? Les autorités ont reconnu mercredi soir, pour la première fois, des morts et des blessés. C’est la seule communication autorisée : les pertes dans l’armée sont classées « secret défense » depuis huit ans déjà. De ce sujet, comme de tout ce qui concerne ces derniers jours, il devient de plus en plus difficile de parler en Russie.

« Bientôt le retour du goulag »

Loi sur les agents de l’étranger, criminalisation de ce qui restait de l’opposition, fuite à l’étranger sous la menace. L’étau sur la société russe était déjà extrêmement fort. Le Kremlin veut le visser à l’extrême. La radio Ekho Moskvy (« Écho de Moscou »), dont le signal avait été coupé mercredi pour avoir parlé de « guerre » et non d’« opération spéciale », vient de se saborder. Elle était, jusqu’à cette semaine, l’un des rares endroits où des opposants pouvaient s’exprimer.

Dans les familles et entre amis, c’est parfois la panique : « Bientôt le retour du goulag », ai-je pu entendre. Parfois aussi la colère et la volonté de résistance, parfois enfin le déni absolu. Des liens aussi qui s’abîment avec la partie de la société qui soutient encore le pouvoir.

Graffitis antiguerres et pétitions

Mais il y a aussi ce murmure des confidences sur des messageries sécurisées. « Nous sommes foutus », dit-on même chez les fonctionnaires. « Je ne pensais pas que je pouvais détester Poutine encore plus qu’avant », confie un cadre d’une grande entreprise d’État. Il y a aussi ces graffitis antiguerres sur les murs et des pétitions nombreuses, comme celle des étudiants de MGIMO (Institut d’État des relations internationales de Moscou) qui a fait du bruit. C’est l’une des universités les plus prestigieuses de Russie et ceux qui en sortent sont destinés à être cadres au ministère de la Défense et des Affaires étrangères : « Il est moralement inacceptable de nous taire alors que des gens meurent dans le pays voisin », est-il écrit.

Des rumeurs de loi martiale

Cet étudiant a signé, mais a souhaité rester anonyme pour l’interview à un média étranger : « Moi, comme certains étudiants, on peut voir les conséquences des sanctions imposées contre notre pays. Beaucoup de gens comprennent les répercussions négatives, néfastes pour notre économie, pour le niveau de vie des citoyens russes. En deuxième lieu, c’est très important. Aujourd’hui, il y a beaucoup de moyens diplomatiques afin d’essayer de ne pas avoir d’escalade. On pourrait établir des contacts stables. »

Ce vendredi a été mis à l’agenda une réunion du Conseil de la Fédération de Russie. La rumeur enfle : le pouvoir pourrait prononcer la loi martiale avec, à la clé, la censure militaire : interdiction totale de tout rassemblement et manifestation, interdiction de toute organisation considérée comme minant la sécurité du pays.

Source: rfi.fr