Cheick Doukouré confie dans cette interview sa forte envie de retrouver l’équipe nationale de football pour la nouvelle aventure avec les Eléphants dans le cadre de la CAN TotalEnergies 2023 en Côte d’Ivoire.
Je suis né en Côte d’Ivoire. Je suis parti avec mes parents à l’âge d’un an en France. J’ai eu le parcours type d’une famille qui immigre en Occident. J’ai eu la chance d’avoir des parents qui ont tout fait pour que leurs enfants ne manquent de rien même si on a vécu dans des conditions précaires du côté d’Aubervilliers. Mais on a tout fait pour s’en sortir.
Comment le foot est-il venu à toi ?
Toi-même tu le sais, quand tu vis dans les quartiers, surtout en région parisienne, le football c’est une religion. Je suis tombé dedans comme tous les jeunes enfants de région parisienne. Ensuite, j’ai eu ma première licence à l’âge de sept ans. Au départ, le football n’était pas forcément un objectif car mes parents voulaient que j’ai un métier disons stable, assez valorisé. C’est par la suite que j’ai pensé à devenir professionnel.
Tu as quitté la Côte d’Ivoire très jeune pour t’installer en France ? N’était-ce pas compliqué ?
Moi je n’avais qu’un an, donc ça allait. C’est surtout pour mes parents que c’était compliqué pour s’adapter à une nouvelle façon de vivre. Moi je n’ai rien ressenti, je suis allé à l’école comme tous les enfants, j’ai eu des amis comme tous les enfants. Ma mère nous a inculqué les valeurs ivoiriennes et je parlais avec le reste de la famille par téléphone.
Comment Lorient t’a-t-il détecté ?
Ils m’ont détecté à un tournoi de jeunes. Il y avait beaucoup d’équipes qui nous supervisaient comme le PSG, Nantes, Lille…Mais avec ma famille on a choisi Lorient car on a jugé que c’était l’équipe qui me permettrait d’avoir un parcours aussi bien footballistique que scolaire. C’était très important pour mes parents que j’ai un bon parcours sur le plan éducatif.
Qu’as-tu ressenti au moment de la signature de ton premier contrat professionnel ?
J’étais très heureux. En plus, en m’éloignant de ma famille, ce départ à Lorient m’a permis d’être plus indépendant et c’est à ce moment-là que je me suis rendu compte que je pouvais percer dans le football. J’en avais besoin. J’ai mis tous les moyens de mon côté pour y arriver. Je me suis privé de beaucoup de choses à cette époque-là. Je me suis mis dans une bulle quand je suis arrivé à Lorient, je me suis coupé de toutes distractions. Je connaissais aussi ma situation familiale et je devais réussir pour sortir ma famille de la galère.
Comment jugerais-tu ton expérience à Épinal ?
J’avais fait toute ma formation à Lorient. J’étais un petit peu dans un confort. Il fallait que je me fasse violence et c’était le bon moment pour le faire. Épinal, ce n’était pas la destination que j’avais choisi mais par concours de circonstances, je me suis retrouvé là-bas. Il y avait ce projet de monter en Ligue 2. Malheureusement, on n’y est pas arrivés mais on avait fait un beau parcours en Coupe de France (éliminé en huitième de finale par Lens, ndlr). On avait éliminé Lyon et Nantes. J’ai pu engranger de l’expérience et rencontrer ma femme. On va dire que c’est une expérience qui n’était pas « négative ». D’un point de vue sentimental, elle a plus que bien servi (rires).
Après sept ans à Lorient, tu rejoins Metz. Quelles en sont les raisons ?
Christian Gourcuff était sur le départ, moi j’étais en fin de contrat. Sylvain Ripoll (son successeur, ndlr) m’a parlé. Il y avait énormément de joueurs à mon poste, il m’a donc demandé d’attendre et m’avait dit que je serais en quelque sorte le « troisième milieu de terrain », c’est-à-dire important mais pas titulaire indiscutable. Au début, j’ai attendu. Mais le temps passe et dans ces moments-là, ce n’est jamais facile de rester tranquille. Metz s’est donc présenté avec un beau projet. J’ai choisi d’y aller. Le jour où j’ai signé à Metz, je suis sur le chemin du retour, et Sylvain Ripoll m’appelle me dit que c’est bon, qu’il a l’intention de me refaire signer un nouveau contrat. Je lui dis cependant que j’ai signé à Metz mais il l’a bien pris, il a été footballeur, il a compris. Et je ne regrette pas, Metz est le club qui m’a permis de passer un cap.
Quel sentiment as-tu à chaque fois que tu portes le maillot de la Côte d’Ivoire ?
C’est l’objectif absolu, c’est vraiment un rêve d’enfant. J’ai toujours voulu porter le maillot qui représente mon pays, celui de mes parents. Il n’y a pas plus grande fierté pour moi que d’entendre l’hymne national retentir. C’est la plus grande récompense de tout footballeur.
Hervé Renard est le sélectionneur qui t’as permis de porter ce maillot. Est-ce l’entraîneur le plus important de ta carrière ?
Il y en a eu beaucoup. Si je devais retenir un entraîneur, ça serait Claude Dulorme, mon premier entraîneur à Aubervilliers. Mais Hervé Renard, c’est vrai que c’est celui qui m’a permis de connaître ce niveau international, de revêtir ce maillot. Je lui serai à jamais reconnaissant d’avoir pensé à moi, de m’avoir appelé et de m’avoir permis d’ajouter un titre à mon palmarès (la CAN 2015, ndlr). C’est une personne droite, juste, qui ne fait pas de coups tordus. Il m’a marqué par sa sincérité et sa justesse. Ces personnes là sont rares dans le football d’aujourd’hui et je ne l’oublierai jamais, c’est certain et c’est l’un des coachs les plus importants de ma carrière.
Comment vis-tu le fait de ne plus être appelé depuis un petit moment (2019) ?
C’est difficile. La sélection, un moment donné, quand tu t’y es habitué, c’est dur d’en sortir. J’avais toujours l’objectif d’être bon en club pour y aller. Quand tu as l’annonce de la liste, tu as toujours envie d’entendre ton nom. Depuis un moment, ce n’est plus le cas. C’est normal avec toutes les blessures que j’ai eues. Mais aujourd’hui, j’ai vraiment retrouvé le rythme et c’est ce que je recherchais depuis des années. J’espère, à force de travail, retrouver la sélection car de belles échéances arrivent notamment la CAN en Côte d’Ivoire en 2023.
Le fait que la prochaine CAN se déroule en Côte d’Ivoire est-il une source de motivation supplémentaire ?
Il n’y a pas meilleure motivation. On a envie de vivre la meilleure émotion possible mais aussi en donner aux Ivoiriens. On aura toute la force pour espérer la gagner. Il y a des joueurs exceptionnels dans cet effectif, de nouveaux sont encore arrivés depuis mon départ. La France l’a découvert en mars dernier. C’était une belle vitrine pour nous, on a pu montrer nos qualités. Il y a beaucoup d’engouement et j’ai envie d’en faire partie. (La suite sur onzemondial.com)
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