Josué Guebo, écrivain ivoirien classé parmi les plus prolifiques d’Afrique a accordé une interview à Laurore.net. Dans cet entretien, il parle de la littérature ivoirienne et africaine et donne par ailleurs son point de vue sur la situation politique ivoirienne.
Qu’est-ce que ça vous fait, de savoir que vous êtes classé parmi les écrivains africains les plus prolifiques ?
Être un auteur prolifique n’a jamais été un gage de qualité. Ce type de classifications peut flatter l’ego, mais chacun sait que le sérieux d’un auteur se mesure moins au nombre des livres produits qu’à leur pertinence littéraire ou scientifique.
Quel est donc votre secret pour être si prolifique ?
Je n’ai aucun secret en la matière, puisque cela n’a jamais été un objectif pour moi d’être considéré comme prolifique. Si je suis prolifique, je le suis par défaut, car en littérature, je n’ai au fond qu’un but : tenter de produire des œuvres de qualité. La quantité n’est pas nécessairement inscrite au rang de mes challenges. Mais, je pense que c’est peut-être l’insatisfaction que je ressens face à mes livres déjà produits qui déclenche en moi la volonté d’en produire d’autres.
Quel est votre regard sur la littérature africaine en général et ivoirienne en particulier ?
La littérature africaine se porte bien en termes d’auteurs. Chaque année apporte son lot d’écrivains qualifiés. La littérature anglophone est assez remarquable avec des auteurs imposants comme Chimamanda Ngozi Adichie. Dans la sphère francophone on a des plumes comme Leonora Miano, Gauz ou Patrice Nganang. Ce sont des voix sûres. Par contre, la difficulté se situe au niveau de la résonance que la littérature africaine a sur le continent. Nous devons admettre que l’industrie du livre est un peu faible en Afrique, de sorte que les auteurs originaires du continent ne sont reconnus et consacrés, pour la plupart, qu’en dehors des frontières de l’Afrique.
Une dernière question politique, quelle lecture faites-vous de la situation politique en Afrique marquée par des élections toujours contestées.
La situation politique de crise en Afrique nous indique clairement une chose essentielle : nous devons apprendre à respecter la loi. En Côte d’Ivoire, comme au-delà, le mal est essentiellement lié au manque de probité, au manque de respect des règles que l’on s’est fixées. Certains prétendent incarner la légalité quand ils sont eux-mêmes une injure à la loi. Avec de telles impostures, il est clair que la paix ne peut être préservée.
Quel conseil pourriez-vous donner aux jeunes qui souhaiteraient suivre vos pas ?
J’ai coutume de dire que l’écrivain est un lecteur porté à combustion. Si l’on veut s’engager en littérature, il faut garder une bonne culture de lecteur. L’on doit chercher à lire ses prédécesseurs et tenter de faire la distinction entre les auteurs : ceux réellement doués et ceux approximatifs. Le progrès en littérature, comme dans plusieurs autres domaines de la vie, provient généralement de ce que nous faisons de l’expérience des anciens ; Elle nous livre un matériau de base ; dont nous devons nous démarquer, si ce matériau est douteux ou auquel nous devons nous identifier, si cette matière première est exemplaire.
Sandra Kohet