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Presse- Des journalistes analysent la mévente des journaux papier et font des propositions de sauvetage

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Les jours du journal papier sont-ils comptés ? Les chiffres de vente de l’année 2020 de la presse quotidienne nationale publiés le 1er avril 2021 par l’Autorité nationale de la presse (ANP) révèlent un état comateux des entreprises de presse. Une situation qui interroge sur l’avenir du journal papier.
Selon ces chiffres, en 2020, 26 entreprises de presse quotidienne ont mis sur le marché 21 331 094 exemplaires. Seulement 4 468 437 exemplaires ont été vendus, soit 80% d’invendus. Ce qui représente un chiffre d’affaires (CA) brut de 1 310 537 100 francs CFA.
En 2019, ce sont 6 702 139 exemplaires qui ont été vendus pour un chiffre d’affaires brut de 2 145 202 100 francs CFA contre 7 150 257 exemplaires pour 2 311 783 200 francs CFA en 2018.
En 2 ans, les ventes en volume de la presse quotidienne nationale ont connu une chute de 61,10% pour un chiffre d’affaires en régression de 56, 7%.
Ces chiffres sont assez révélateurs sur la très mauvaise passe financière que traverse les entreprises de presse. “Le Chiffre d’affaire de l’ensemble des journaux en 2020 équivaut à celui de Fraternité Matin, seul, il y a dix ans”, compare David Youant, patron de média.
Aujourd’hui, le journal pro gouvernemental fait un chiffre d’affaires d’environ 280 millions de francs CFA seulement et occupe la première place des ventes.” FRAT-MAT vend surtout la marque et tout ce qu’il y a autour d’annonces légales et consorts”, analyse-t-il.
Plusieurs raisons qui expliquent ce désamour qu’éprouvent les ivoiriens pour leur presse. Notamment le journal papier. Pour le journaliste Martial Alaté, il faut y voir, un certain “amateurisme” dans la gestion des entreprises. “Nos entreprises de presse sont gérées par des journalistes qui ne sont pas forcément des managers. Bon nombre d’entreprises de presse n’ont même pas de service de comptabilité”, soutient-il.
David Youant lie, plutôt cela à un manque de vision de la part des personnes qui, à un moment donné, avaient la charge de gérer ces entreprises.” Pratiquement tous les journaux ivoiriens ont eu leur période de gloire (faste financièrement), avec des chiffres d’affaires dingues, mais nombre d’entre eux sont “tombés”. Les plus téméraires, continuent d’exister, sans avoir développé d’autres segments avec tout cet argent“, soutient-il.
Alafé Wakili, également patron de presse, abonde dans le même sens. Selon lui, les gestionnaires des entreprises de presse ont manqué du sens d’anticipation. “Il y a un contexte nouveau, il y a des habitudes nouvelles que nous n’avons pas encore captées ni investies“, argue-t-il.
En effet, seulement une poignée de journaux comme Fraternité Matin, Soir Info ou l’Intelligent d’Abidjan possèdent une rédaction en ligne.
Exit les problèmes de gestion et environnementaux, Assane Niada, journaliste, soutient que depuis 2002, année de survenue de la crise ivoirienne qui a mis un coup d’arrêt à la distribution des journaux dans le pays, en dehors d’Abidjan, et quelques villes proches qui continuent d’en recevoir normalement, le Groupement des Éditeurs de presse (GEPCI) peine à trouver une solution au problème.” Il y a lieu également de s’interroger sur le prix des journaux qui a connu une augmentation de 50% en avril 2014. Le prix est passé de 200fcfa à 300fcfa”, explique-t-il.
Cependant, les acteurs sont unanimes sur un fait : la presse papier ne mourra pas.” Il y a un déclin du papier qui n’est pas seulement le cas en Côte d’Ivoire, qui appelle à une réinvention! Le papier peut survivre et se maintenir mais nous devons revoir nos modes de productions”, recommande David Youant. Concrètement, Alafé Wakili suggère une synergie entre le papier, le net et l’audiovisuel, initiative qu’il promeut avec l’Intelligent d’Abidjan, Afrikipresse et l’Intelligent TV.
Maintenant quand on parle de rédaction en ligne – en quoi cela consiste car en réalité, c’est une à deux personnes ! Totalement dédiée. Moi par exemple , pour Afrikipresse j’ai une rédaction autonome de 3-4 personnes. Et le site de L’Intelligent reprend les articles de la version papier ! Il faut noter que de nombreux journaux n’ont même pas de site internet , ou quand c’est le cas, ces sites ne sont pas actualisés… L’enjeu est d’éviter de faire des sites , les clones des journaux. Mais comment ceux ci peuvent avoir des contenus propres sans faire de la concurrence au papier , déjà en difficulté. Voilà une réflexion à mener“, explique-t-il.
Pour certains, comme Bakary Sanogo, patron du Centre d’information et de communication gouvernementale (Cicg), c’est le modèle économique de la presse qui est à revoir.” Les titres dont la notoriété est reconnue doivent développer autour de ce label d’innombrables activités commerciales dans le cadre de la diversification“, indique-t-il.
Israël Guebo, expert média, pour sa part, appelle à un sursaut de la part des hommes et femmes des médias quant à la pratique du métier.” Un journalisme de qualité, un journaliste de qualité, s’abstient de pratiques qui effritent la déontologie et l’éthique”, souligne-t-il.
I.T